La Tunisie a repris ce lundi 11 août le débat sur un nouveau projet de loi antiterroriste. La relance de cette mesure intervient au lendemain de nouvelles révélations sur l'état de la sécurité dans le pays.
Vendredi, le gouvernement avait indiqué vouloir fermer "les sites internet liés au terrorisme, et poursuivre ceux qui les utilisent".
Ces mesures viseraient les sites web appartenant à des groupes de militants jihadistes takfiristes "qui incitent au meurtre des personnels militaires et des forces de sécurité", a indiqué une source gouvernementale à l'AFP.
Le Premier ministre Mehdi Jomaa a également autorisé le rappel de réservistes de l'armée pour assurer la sécurité lors des prochaines élections, a indiqué un communiqué du gouvernement.
Jeudi, le ministère de l'Intérieur avait indiqué avoir démantelé cinq groupes terroristes et arrêté vingt-et-un suspects qui planifiaient des attaques.
La coordination avec les autorités algériennes "se déroule dans de bonnes conditions", a ajouté le porte-parole du ministère, Mohamed Ali Aroui.
"Pendant le Ramadan, des groupes terroristes ont tenté de faire exploser plusieurs usines, notamment une usine de produits chimiques, ainsi que des ponts, des centres commerciaux et plusieurs hôtels", avait déclaré auparavant aux journalistes le ministre de l'Intérieur Lotfi Ben Jeddou lors d'une réunion interministérielle.
Lors de la première réunion de ce type avec des représentants d'autres ministères et des représentants de la presse, mardi dernier, le Premier ministre Mehdi Jomaa avait passé en revue les nombreux défis sécuritaires que doit relever la Tunisie au vu de la dégradation de la situation sécuritaire dans la Libye voisine.
"Dans les mois qui viennent, les terroristes vont dépendre de ce qu'ils appellent "les tueurs au sourire" pour mener leurs opérations ; c'est une stratégie destinée à faciliter l'intégration des terroristes dans la communauté, en portant des vêtements modernes et à la mode, en fréquentant les espaces publics, en évitant les mosquées et les questions religieuses", a-t-il précisé.
Et le ministre de poursuivre : "Une telle stratégie a déjà été appliquée dans de nombreux pays européens. Lors de l'attentat de Madrid, le terroriste avait passé la nuit dans un nightclub avec son amie avant de mener son opération à l'aube dans un train de la capitale espagnole."
La Tunisie partagera des renseignements avec les pays voisins, pour "nous aider à mettre en place une stratégie complète de lutte contre le terrorisme", a-t-il ajouté.
Le terrorisme menace non seulement les régions rurales comme le Jebel Chaambi, mais aussi des quartiers et des villes entières, a indiqué pour sa part le ministre de la Défense Ghazi Jeribi.
"Nous nous préparons au pire des scénarios, c'est-à-dire au lancement simultané de plusieurs opérations par plusieurs groupes terroristes en différents lieux", a-t-il expliqué.
Concernant la menace de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) et al-Qaida, Jeribi a déclaré : "Chaque groupe veut apparaître plus sanglant que l'autre, pour attirer plus de sympathisants en utilisant différents moyens de recrutement."
Le ministre de l'Intérieur Ben Jeddou a souligné que la brigade Uqba Ibn Nafaa avait "adopté une nouvelle stratégie pour surmonter le siège qui lui est imposé". Elle s'appuiera en effet "sur les habitants de la région pour mener ses opérations", a-t-il expliqué.
Cette stratégie consistant à rechercher des populations locales ne répondant pas au profil type du terroriste a déjà été utilisée avec succès par le passé, souligne l'analyste Tarek Beltaib.
Tous les membres du groupe terroriste éliminé l'année dernière à Raoued étaient "rasés de près" et portaient "des vêtements qui n'éveillaient aucun soupçon"', a-t-il ajouté.
"Les citoyens ordinaires doivent rester prudents", a-t-il mis en garde. "Ils ne doivent pas juger sur les apparences, mais sur les actes et les propos tenus", ajoute-t-il.