C'est "un drame d'une rare violence", selon la formule du ministère de la Défense, qui s'est produit lundi sur la base militaire espagnole d'Albacete. Alors qu'il était en cours de décollage, un avion F-16 biplace de l'armée de l'air grecque a connu, pour des raisons encore inconnues (sans doute une perte de puissance de son unique réacteur), des problèmes techniques et s'est écrasé sur une zone de stationnement où se trouvaient d'autres avions et du personnel d'autres nationalités.
Entre la vie et la mort
Le bilan est terrible : les deux pilotes grecs, qui n'ont pas pu s'éjecter, sont morts, de même que neuf aviateurs français - huit sur le coup et un neuvième de ses blessures mardi matin. Sur BFM TV, le général Denis Mercier a précisé que les Français décédés dans la nuit de lundi sont deux pilotes, un navigateur et cinq mécaniciens. Ils provenaient pour six d'entre eux de la base aérienne 133 de Nancy et pour les deux autres, de Châteaudun et de Mont-de-Marsan. Mardi matin, cinq autres blessés étaient encore en réanimation, dont deux placés en coma artificiel. Trois autres blessés légers étaient en sortie d'hôpital. L'accident a également provoqué des blessures chez plusieurs aviateurs italiens, neuf ou onze selon les sources.
Dans un communiqué publié lundi soir, le président de la République François Hollande a adressé "ses très sincères condoléances aux familles, aux proches et à leurs camarades, et les assure de la pleine solidarité de la nation en ces douloureuses circonstances". Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian se rendra sur place mardi après-midi en compagnie du chef d'état-major de l'armée de l'air, le général Denis Mercier. La ministre de la Défense italienne Roberta Pinotti devrait faire de même. On devrait alors en savoir davantage sur les circonstances de l'accident.
Tactical Leadership Program
Tactical Leadership Program est un programme régulier de formation de l'Otan, mis en place de longue date en Belgique et installé en 2009 sur la base espagnole où les Français viennent partager avec leurs alliés leur expérience des opérations aériennes complexes.
Sur son site, le ministère de la Défense français expliquait en 2013 qu'"en 35 ans d'existence, la méthode d'apprentissage de TLP a fait ses preuves. Après une première phase théorique au sol, les vols commencent très rapidement. Durant les quatre semaines de stage, une COMAO (Composite Air Operation) est programmée chaque jour. Cette dernière obéit à un scénario dont la difficulté est croissante. Tous les types de missions aériennes sont étudiés : interdiction aérienne, entraînement au combat de type DACT (Dissimilar Air Combat Training), attaques au sol, reconnaissance, missions de recherche et de sauvetage au combat (Combat Search and Rescue - CSAR)."
Les appareils et les équipages français participant à ces manoeuvres disposaient au moins de Mirage 2000-D et d'Alphajet, puisque la défense française signale que des appareils de ce type ont été endommagés dans l'accident.
Accidents rarissimes
L'enquête, qui a d'ores et déjà été ouverte par les autorités espagnoles, l'Otan et les armées de l'air concernées, tentera de trouver une explication à cet accident rarissime. Les avions modernes et les procédures qu'ils appliquent rendent ce type d'événement de plus en plus rare.
L'armée de l'air venait néanmoins d'être frappée par un accident récent : le 10 décembre, un Alphajet de la base aérienne de Tours s'était écrasé sur un foyer de vie pour adultes handicapés de Vouvray (Indre-et-Loire). Les deux pilotes s'étaient éjectés sans dommage, mais un résident du foyer avait trouvé la mort.
L'accident d'Albacete est le plus grave subi par l'armée de l'air française depuis sept ans. En octobre 2007, un Twin Otter français affecté à une mission d'observation de l'ONU s'était crashé dans le Sinaï, provoquant la mort de huit aviateurs français et d'un canadien. Une erreur humaine avait été mise en cause par l'enquête.
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Crash du F-16 : l'armée de l'air française en deuil
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