La Suède met ses principes en action. Le gouvernement de gauche vient de mettre fin, au nom des droits de l'Homme, à sa coopération militaire avec l'Arabie saoudite. Résultat, une poussée de fièvre avec Riyad, partenaire stratégique des Occidentaux au Moyen-Orient.
La coalition entre sociaux-démocrates et Verts, arrivée au pouvoir en octobre, s'est lancée dans une diplomatie audacieuse qui tranche avec la prudence de son prédécesseur de centre-droit, focalisé sur une bonne entente avec ses partenaires d'Europe de l'Ouest, Grande-Bretagne et Allemagne en tête.
Fin de l'accord de coopération militaire
Stockholm a annoncé mardi soir le non renouvellement d'un accord de coopération signé en 2005, qui avait permis à l'époque au suédois Saab de vendre ses radars. Le ministre de la Défense, Peter Hultqvist, a estimé que mettre un terme à cet accord s'imposait, "en partie parce qu'il ne génère pas d'activité, en partie parce qu'il n'y a pas de soutien" pour le prolonger au sein de la coalition gouvernementale. L'opposition de centre-droit et le patronat avertissent en revanche que le pays prend le risque de perdre des contrats. Selon le cabinet londonien IHS Janes, l'Arabie saoudite a dépassé l'Inde pour devenir en 2014 le premier importateur mondial d'équipements militaires. Elle est le troisième acheteur d'armes suédoises hors pays occidentaux.
Une 'politique étrangère féministe'
Ce contentieux s'ajoute à celui déclenché avec la ministre Affaires étrangères suédoise, Margot Wallström, quelques jours plus tôt.
"Fière d'être claire sur la démocratie et les droits de l'Homme", a écrit Margot Wallström, sur Twitter tard mardi soir après l'annonce de son collègue de la Défense.
La ministre revendique par ailleurs une "politique étrangère féministe". Tout en évitant d'évoquer directement la condition des Saoudiennes, elle a agacé Riyad en dénonçant les "méthodes moyenâgeuses" de la justice saoudienne contre le blogueur Raef Badaoui, flagellé pour "insulte à l'islam". A tel point que lundi, les Saoudiens ont obtenu qu'elle ne prononce pas un discours prévu devant la Ligue arabe au Caire.
"Une ingérence flagrante dans les affaires intérieures du royaume"
Mécontentes, les autorités saoudiennes ont fait part de leur mécontentement en rappelant leur ambassadeur à Stockholm. Les déclarations de la ministre suédoise des Affaires étrangères constituent "une ingérence flagrante dans les affaires intérieures du Royaume" saoudien a dénoncé un porte-parole du ministère des Affaires étrangères à Ryad.
Une diplomatie audacieuse
L' ambitieuse différence diplomatique de Stockholm ne date pas d'aujourd'hui. Elle a été illustrée, par le passé, par la politique étrangère du plus prestigieux des Premiers ministres sociaux-démocrates suédois, Olof Palme. Dans les années 1970 et 1980 il avait adopté une ligne dure contre l'Afrique du Sud de l'apartheid, l'Espagne de Franco ou le Chili de Pinochet. Stockholm garde depuis une image d'allié de l'OLP en Palestine. Depuis le retour de la gauche au pouvoir, à l'automne, la Suède a reconnu l'État palestinien. La décision a irrité Israël, qui a rappelé son ambassadeur à Stockholm durant un mois.
La Suède s'illustre également par sa politique d'accueil des réfugiés. Elle est le pays européen qui accueille le plus grand nombre de réfugiés au regard de sa population.
Un "modèle" diplomatique suédois que pourrait méditer Paris, dont la récente vente de 24 Rafales à l'Egypte fort peu démocratique du maréchal al-Sissi a soulevé de nombreuses critiques.
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La Suède adopte une diplomatie audacieuse et se brouille avec l'Arabie Saoudite
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